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Revue des sciences sociales

N° 35 - 2006

Nouvelles figures de la guerre

sous la direction de Pascal Hintermeyer & Patrick Schmoll





Le modèle clausewitzien tend à présenter la guerre comme une série de coups échangés de part et d'autre d'une ligne de front par des adversaires mutuellement bien identifiés. Ces derniers sont des États-nations, ancrés dans des territoires dont les armées défendent les frontières. Les formes de la guerre sont conditionnées par des distinctions claires entre l'intérieur et l'extérieur, et entre les domaines civil et militaire. Les fronts sont délimités, les médias sont au service de la cohésion nationale pour soutenir l'effort de guerre, les populations civiles et les pays non concernés ne pâtissent des effets de la guerre que du fait de retombées considérées comme indirectes.

La guerre du Kosovo, l'intervention américaine en Afghanistan, la seconde guerre du Golfe ont confirmé l'émergence d'un autre modèle de guerre. Dans celui-ci, les frontières, les fronts et les distinctions classiques ne sont plus clairement marqués. Les entreprises multinationales pèsent plus lourd que certains États, et les États-Unis, désignant l'attaque des tours du World Trade Center en 2001 comme un “acte de guerre”, reconnaissent du même coup à une organisation terroriste un statut d'alter-ego, de quasi-État. Les médias n'agissent plus au service univoque du pays et ont une influence dispersive, les cibles suscitent des discours antagoniques, et celui qui écrase l'adversaire par trop de morts perd la guerre devant sa propre opinion publique. Les interventions de pays extérieurs ne sont plus clairement ressenties comme des ingérences. L'ennemi peut être une armée conventionnelle, ou un groupe de francs-tireurs ou un réseau terroriste, qui se confondent avec une population qui peut être sympatisante, passive ou hostile. Certaines opérations militaires tendent à être conduites, et d'ailleurs à être présentées médiatiquement, comme des opérations de police. La figure de l'ennemi “intérieur” menace de ressurgir dans un temps de paix conçu comme préparatoire à la guerre, voire comme le temps d'une guerre qui ne dit pas son nom.




Sommaire


Présentation
Pascal HINTERMEYER & Patrick SCHMOLL   Nouvelles figures de la guerre : vers un changement de paradigme

Repenser la guerre
Myriam KLINGER   Dix années d'Études polémologiques. La mise en œuvre du projet scientifique de Gaston Bouthoul
Philippe BRETON   Y a-t-il vraiment de nouvelles guerres ? Ou quand la modernité cache mal l'archaïsme
Sébastien SCHEHR   Transformations de la guerre, métamorphoses du combattant : penser la guerre aujourd'hui
Jean-Marie MULLER   Concevoir des alternatives non-violentes à la guerre

Terrorisme
Pascal HINTERMEYER   Entre guerre et paix : le terrorisme
Sacha & Didier RAOULT   Le bioterrorisme : la terreur bon marché

Médiatisation
Ulrich HÄGELE   War is over ! Pour une iconographie des fins de guerre
Michael SCHNEGG & Julia PAULI   Les cyberguérilleros ne se battent pas seul. Réseau et mobilisation dans le soulèvement zapatiste
Birgit BRÄUCHLER   La mondialisation des conflits locaux. Usages stratégiques d'Internet dans le conflit des Moluques

Virtualisation
Patrick SCHMOLL   Les mutations de l'organisation militaire à l'ère de la guerre numérique
Tony FORTIN   Cyberwar : figures et paradoxes de la rhétorique des jeux vidéo de guerre

Dossier : Maurice Halbwachs, soixante ans après Buchenwald
Christian de MONTLIBERT   Une histoire qui fait l'Histoire : la mort de Maurice Halbwachs à Buchenwald
Pierre AIÇOBERRY   Les organes allemands de répression en France de 1940 à 1944
Freddy RAPHAËL   “Encore Auschwitz !”
De l'ère du témoin à l'ère du soupçon : les enjeux de la mémoire et de l'histoire

Carnets de route
Michel NACHEZ & Patrick SCHMOLL   “L'apprêt-guerre”. Dresde, ou la beauté au prix de l'oubli
Éric SCHMOLL   Du Rwanda à l'Irak. Notes sur la guerre à partir d'un travail humanitaire

Chantiers de recherche
Marie-Noële DENIS   Les monuments aux morts de la guerre de 1870 en Alsace
Claudia PORTIOLI   La tombe de Simmel dans l'obscurité : ruine ou occasion de mémoire ?
Anne-Sophie LAMINE   Les foulards et la République



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